Un ouvrage à prendre brut de brut

La couverture, est un désert d’humanité ! Une terre, au sous sol inexploré, un entre, « sol et ciel » émergeant en sommet de colline dans une atmosphère terrestre désertique et noircie, juste corrigé par un disque bleu. Tranchant avec cette terre, imparfaitement aimée, un au-dessus de clarté, nuageuse, accueillant le titre finalement choisi « Dans sa main ». La main de qui ? Dieu, certainement, au terme d’un combat constant et sans doute final avec celui qui un jour lui a dit « Tu m’appartiens » ? Le livre est une succession de malaises, de doutes, de questionnements incessants, de rébellions ; de recherche d’authenticité ou plutôt d’autonomie… car « elle » ne veut plus se faire prendre ! y compris par Dieu.

 

dans sa main

Christiane dit sa vérité, ou ses vérités, c’est selon… Serait-elle bienveillante ? Les humains et institutions qu’elle a croisés pourraient apporter des nuances, et du contradictoire… Mais l’auteur reste une révoltée, une insoumise. Son écrit peut-être injuste, il est à la mesure de témoignages qu’elle continue à recevoir de la part de membres de communautés nouvelles qui viennent à elle. Il est aussi à la mesure des grands bouleversements civilisationnels et ecclésiaux qui ont eu lieu depuis la deuxième guerre mondiale. L’enfance est marquée par l’avant Vatican II. La jeunesse par l’emprise d’une communauté nouvelle, comme résurgence de la tutelle ayant pu exister dans l’Église ancienne. L’âge adulte reste profondément bousculé par une Église continuant de tenir et d’affirmer en interne des dogmes dont en externe, l’exégèse et l’Histoire permettent de relativiser ou resituer la vraisemblance.

Alors Christiane se réfugie dans les expressions de la foi populaire, celles du charbonnier, celles de sa mère. Elle les explore avec constance et un sens aigu de l’observation, par les visites des chapelles et des églises. Elle le fait avec Patrick, depuis maintenant vingt ans. Ensemble ils ont rassemblé des milliers de photos et leurs ouvrages sont devenus des références pour le patrimoine, et le tourisme régional :

      • Nos petites églises, des clefs pour visiter et comprendre
      • Nos petites églises, Histoire et petites histoires
      • La Vierge de nos petites églises
      • La grande verrière de la cathédrale Saint-Samson de Dol-de-Bretagne
      • Que raconte la grande verrière ?

C’est devenu son côté « face », celui qui l’apaise, celui qui lui redonne confiance, celui qui la réconcilie avec l’Église vue en amitié… celui par lequel elle pourrait donner suite à la Parole entendue, pour être « dans sa main », sinon aujourd’hui du moins dans la mort ? Son nouveau livre est révélation du côté « pile », celui des révoltes successives. Celui d’un combat qu’elle veut faire aboutir, non plus tellement pour elle, mais pour celles qui font appel à son « ministère ». Un mot qu’elle ne pourra que récuser, la connaissant, je le sais trop bien…

Mais justement parlons-en de ces ministres du culte et responsables de communautés religieuses à qui elle voudrait faire comprendre le sens de ce dernier combat qui n’est plus « pour elle ». En leur disant ce qu’elle a vécu, elle ne renie pas son passé, elle l’expose tel qu’il fut. Elle dit ses rencontres du monde cultuel, les bonnes et les moins bonnes. Elle témoigne de beaux parcours de vie religieuse, soit toujours à l’intérieur de communautés religieuses, soit comme retournés à la vie civile mais toujours au service de leur Église ou de leur culte. Elles témoignent de vies humaines devenues libres y compris dans l’agnosticisme ou l’athéisme, dit sa militance dans les associations aux services des victimes, Avref, Envers du décor, APRC

Elle souhaite pouvoir dire plus spécialement au culte catholique qui reste le sien : «  comprenez un peu mieux ce qui s’est passé, et ce qui se passe encore… ayez le courage de réparer. Les tribunaux de la République ont montré en quoi vous aviez fait fausse route. A la lumière des débats sur la liberté de conscience et de religion, vos institutions doivent se remettre en cause. Vous continuez à les régir par un système hiérarchique ne permettant pas la juste expression des assurés sociaux. Je le vois par mon expérience d’Administratrice à la CAVIMAC, ou par les dossiers que je présente au SAM : les points de vue institutionnels ont tendance à méconnaitre les points de vue des assurés, à perpétuer les injustices commises ». Ces mots que je lui attribue sont ceux de l’association qui est notre. Merci Christiane.

Jean Doussal