2005-2023 « Les Diocèses de plus en plus déficitaires »
Après les constats démographiques, puis ceux portant sur la « richesse » présumée du diocèse de Lille, ce troisième volet analyse ses comptes de résultats : il est important de le rappeler, cette étude consacrée à un diocèse particulier est valable pour tous les diocèses de France.
Chaque année, les diocèses de France et la Conférence des évêques comparent les chiffres aux deux, trois ou quatre années précédentes. Cette méthode conduit à minimiser une dégradation qui ne date ni du Covid, ni du rapport Sauvé ; même si ces événements ont pu accentuer une situation déficitaire déjà problématique. Les raisons sont beaucoup plus profondes, ainsi que les rapports comptables des années 2005, 2011, 2017 et 2023 (soit chaque fois avec un écart de six ans), vont le démontrer.
De Plus En Plus Déficitaire Tableau Résultats -( à télécharger)

1) En 2024, l’exceptionnel n’a pas comblé le structurel
L’année 2024 n’étant pas disponible au début de cette étude, nous relèverons, à l’occasion, une éventuelle rupture de tendance ou la confirmation des évolutions précédentes. En l’occurrence, le déficit de fonctionnement passe de quatre millions deux (2023) à six millions six, soit un million quatre de plus en (2024) !!! En outre, et pour la première fois en 2024, le résultat final n’est pas rattrapé par les résultats financiers et exceptionnels. C’est donc un déficit d'un million trois qui est mis à la charge des « Fonds propres » pour l’année 2025 (1)…
De 2017 à 2023, les ressources ont augmenté, passant de vingt et un millions huit, à vingt-neuf millions six. Une amélioration qui en réalité ne l’est pas, car elle tient à une nouvelle manière de comptabiliser les legs et assurances vie : dans les « produits exceptionnels » avant 2023, ils sont à présent pour tous les diocèses considérés comme recette régulière de fonctionnement, au lieu de l’être dans l’exceptionnel… ce qui en résultat final ne change rien à la dégradation.
La stabilité apparente de la collecte du denier et des quêtes de 2005 à 2017, se maintenant durant douze ans à treize millions, ne prend pas en compte l’inflation : une augmentation aurait dû être au moins égale à celle-ci. L’argument régulièrement avancé « moins de donateurs, mais ceux qui continuent à donner sont plus généreux » sert à cacher la baisse des donateurs, liée au regroupement des paroisses et à la démographie des donateurs. La tendance 2005-2023 demeure une érosion lente, mais continue parce que les donateurs se meurent au sens propre du terme, tandis que les générations suivantes sont peu éveillées à la prise en charge de leur Église et que de toute manière, ils seront moins nombreux !
2) Depuis vingt ans, les déficits n’ont fait que croître
La normalité serait que les recettes de fonctionnement couvrent au moins de façon habituelle les dépenses du même ordre. Aucune des années considérées n’assure ses dépenses par ses recettes courantes. Plus grave, d’année en année, le déficit devient de plus en plus conséquent : un million huit (2005), deux millions huit (2011), quatre millions cinq (2017), cinq millions deux 2023… et six millions six en 2024 !
La croyance demeure que les résultats financiers et/ou exceptionnels compenseront. Or force est de constater que les premiers ne sont pas toujours au rendez-vous, (2011 et 2017). D’un résultat final s’élevant à trois millions en 2005, on passe à un demi-million en 2023, et un déficit en 2024...
Lorsqu’en mars 2025, l’économe diocésain s’époustouflait devant un tel constat, en affirmant que chaque année le diocèse devait prélever quatre millions sur l’épargne du diocèse. Clamant que « ça ne pouvait plus durer »… Il disait juste, mais en occultant le fait que de l’épargne avait déjà été cédée, que les possibilités de cessions étaient raréfiées, que les legs et assurance vie faisaient désormais partie des recettes de fonctionnement et que malgré cela le déficit de fonctionnement 2024 était de -6 597 039 €. Le diocèse peut de moins en moins espérer comme par le passé puiser dans son épargne, il doit s’atteler désormais à avoir un fonctionnement encore plus contraint.
3) Sécurité des prêtres, insécurité des LEME
Revenons aux données démographiques recensées dans le premier volet de notre enquête : 129 prêtres en activités et 104 prêtres ainés extraits du JO. Pour ses prêtres, le diocèse garantit une « honnête subsistance » jusqu’à leur mort. Actifs ou non, ils restent à égalité dans les traitements dont ils bénéficient. Les laïcs, au nombre de 241, peuvent être salariés à temps plein ou partiel, ou bénévoles. Ils sont dans l’insécurité de l’emploi, et s’ils sont bénévoles, leur protection sociale est mal assurée. Beaucoup de ces derniers, femmes en particulier, découvriront, au moment de la liquidation de droits à pension vieillesse, qu’il leur manquera des trimestres, pour bénéficier du « taux plein » ce qui les empêchera de partir en retraite à l’âge légal…
La question « Diocèses en faillite : bientôt les prêtres au boulot ? » dont nous débattions en avril 2025, n’est plus un sujet tabou (2).
Jean Doussal 7 octobre 2025
(1) Voir à ce sujet le deuxième volet de notre enquête intitulée : « Lille : 2005-2023 La spirale de l’endettement », paragraphe consacré au « passif » traitant des capitaux propres et des emprunts.
(2) https://www.golias-editions.fr/2025/04/02/dioceses-en-faillite-bientot-les-pretres-au-boulot/
ou https://aprc.asso.fr/les-pretres-obliges-de-travailler-pour-vivre/
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Ce dimanche soir 09 novembre, j’ai entendu à la radio, sur une station non confessionnelle de bonne audience nationale, un appel à don pour le diocèse d’Albi, appel adressé à tous, « croyants ou non croyants » : il faudrait 400 000 euros au diocèse pour pouvoir boucler l’année. Au passage était mentionnés le traitement des prêtes, 1100 euros par mois (*), et le salaire d’une trentaine de laïcs, l’objectif « absolu » de l’évêque étant de ne licencier personne.
On expliquait aussi que depuis les années 2000, le nombre des donateurs s’était réduit de 50% ; que, par contre, le nombre des confirmants avait beaucoup augmenté (plus de cent cette année contre quelques dizaines naguère), et qu’on avait besoin de moyens pour les soutenir, les emmener en pèlerinage par exemple.
(*) non précisé : les prêtres ne supportent aucun frais liés au logement.
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Egalement entendu il y a peu : le Secours catholique, pour la première fois de son existence, a récemment dû mettre en œuvre un plan social.
Merci pour cette minutieuse analyse. Cette défaillance financière explique les rumeurs de « fusions de diocèses »(autrement dit suppression de certains, comme les regroupements de paroisses) , relayées dans la Croix par un gestionnaire de la CEF(Ambroise Laurent) après l’élection du nouveau bureau de la CEF au printemps dernier. Cette situation calamiteuse n’empêche pas de voir fleurir des projets pharaoniques comme la rénovation de la maison natale (un château médiéval) de saint Bernard à Dijon. Ce la fait dix ans que je ne donne plus au denier de mon diocèse, au vu du refus de communiquer des comptes sérieux, notamment la clarté de rémunération des salariés et LEEM. Il existe d’autres besoins proches ou lointains que je soutiens à la place
Réaction tout à fait compréhensible, au regard des restructurations en cours… dont la variable d’ajustement sont les Laïques en mission ecclésiale LEME (volontairement j’ai donné à laïc l’orthographe ci avant d’autant que les femmes y sont majoritaires)
Les « LEME variables d’ajustement » de moins en moins salariés de plus en plus bénévoles…. avec toutes les conséquences sur les trimestres cotisations pensions retraite..
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Sur la question du denier de l’Église de France est en préparation sous le titre » la vérité des finances » un nouveau dossier car si les « comptes » sont en « rouges »… il y a les « Fondations », les richesses des congrégations, et associations de fidèles…
Dans l’analyse des comptes du diocèse de Lille sous l’angle patrimonial (billet du 1 er octobre), je n’avais pas suffisamment approfondi la question des Fonds propres (un terme technique qui peut prendre son sens commun, lorsque ceux ci viennent non pas du diocèse lui même mais des Fondations…)
A bientôt pour de nouvelles découvertes sur le site de l’APRC