Du secret professionnel à la liberté d’expression
Que prescrit le « droit » en matière de secret ? Dans les conseils d’administration des Caisses de Sécurité sociale, l’Administrateur n’est pas le représentant des organisations syndicales ou des instances professionnelles auxquelles il peut par ailleurs appartenir. Ce qui est vrai pour les administrateurs AMC à la Cavimac, l’est de la même manière pour celles et ceux qui appartiennent à la CEF, à la Corref ou à l’instance de tel ou tel « autre culte » Les règles régissant les administrateurs des Caisses de Sécurité sociale ont pour thème le « secret professionnel », le « devoir de réserve » et… la « liberté d’expression ».
1 Le secret professionnel
Au niveau du droit international, la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) garantit le « Droit au respect de la vie privée et familiale » sous cet intitulé. « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ». En droit pénal français : L. 226-13 du code pénal punit l’infraction de révélation, délit passible de correctionnelle : «La révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende ».
Le Guide de l’Administrateur de Sécurité sociale précise, entre autres, le secret préservant les informations sur un assuré ou encore les renseignements relatifs aux cotisations dues par les employeurs, ou encore les renseignements figurant au dossier d’un employé de l’organisme, en précisant sauf « dans le cas où les intéressés y ont expressément consentis ».
Le guide poursuit « en revanche, n’ont pas un caractère confidentiel et peuvent faire l’objet d’une divulgation les renseignements relatifs à la marche générale de l’organisme, à sa situation financière et à l’ensemble de l’activité des organismes de sécurité sociale et de leurs réalisations sociales, mais il est admis qu’un devoir de réserve existe quant au secret des délibérations du conseil d’administration. Il existe, bien entendu, des renseignements à caractère non confidentiel, telles les données statistiques, dès lors qu’elles sont suffisamment globales pour rendre impossible toute identification ». i
Page suivante, le Guide rappelle l’article L 121-2 du code de SS : « les administrateurs disposent, pour l’exercice de leurs fonctions, de tous les moyens nécessaires, notamment en matière d’information, de documentation et de secrétariat ».
En vertu de la loi du 17 juillet 1978, les documents et PV qui émanent des conseils d’administration des organismes de sécurité sociale font partie des documents administratifs qui « sont de plein droit communicables à ceux qui en font la demande ».
2 L’obligation de discrétion et le devoir de réserve
L’obligation de discrétion porte sur les informations et faits dont l’administrateur a connaissance à l'occasion de l'exercice de ses fonctions. Cette obligation s’applique aux documents et informations présentant un caractère confidentiel et défini comme tels par le Président. Le devoir de réserve prévoit qu’un administrateur ne doit pas, ni par ses comportements ni par ses propos, porter gravement atteinte au crédit de la Caisse de SS dont il est administrateur.
Le site service public donne les indications suivantes : « Alors que le secret professionnel couvre les informations des personnes, la discrétion protège les secrets de l'administration. Le devoir de réserve prévoit qu'un fonctionnaire ne doit pas, ni par ses comportements ni par ses propos, porter gravement atteinte au crédit de son institution ».
Obligation de discrétion et devoir de réserve dépendent de la place que l’on occupe dans une institution. Plus on est élevé dans la hiérarchie, plus ces obligations deviennent prégnantes sans cependant interdire la liberté d’expression ainsi qu’on le verra en dernière partie. Elles dépendent aussi du cadre dans lequel les informations sont débattues. Des propos tenus dans un cadre privé ou dans un cadre associatif sans publicité ne sauraient faire l’objet d’une sanction disciplinaire. Ainsi en est-il des réunions et débats qui peuvent avoir lieu dans les instances de l’APRC, de la CEF, de la Corref et des différents cultes. La prudence s’impose dès lors qu’on entre dans le cadre des publications papiers et réseaux sociaux.
3 Liberté d’expression et obligation de modération
Dans la même fiche que précédemment le site service public expose : « Dans la fonction publique française, le devoir de réserve est une exception, limitée, au principe légal de liberté d'opinion, qui implique une modération des propos publicisés des agents publics en dehors de l'exercice de leurs fonctions. Il s'agit, entre autres, de ne pas donner à ses fonctions des fins politiques ».
La liberté d’expression doit être préservée ainsi que l’autocensure a besoin d’être surmontée. L’obligation de discrétion et le devoir de réserve ne sont pas des interdictions de paroles et d’analyse à développer dans les instances des Conseils et des instances auxquelles on peut appartenir.
Pour les Administrateurs d’une Caisse de Sécurité sociale, le lieu normal de leur liberté d’expression est le Conseil et les commissions créées par celui-ci. Encore faut-il qu’ils n’en soient pas exclus…
D’une façon générale, la liberté d’opinion et d’expression est facilitée par la gestion paritaire des Caisses de Sécurité sociale : le nombre égal d’administrateurs représentant les points de vue respectifs des assurés et des employeurs, pose d’emblée la possibilité d’une diversité de points de vue. À la Cavimac cette distinction n’est pas formalisée.
Les erreurs commises au cours des années en matière d’affiliations et de cotisations, tiennent beaucoup au fait que le point de vue « cotisant » étant privilégié, les conséquences pour l’assuré n’ont pas été suffisamment appréhendées en droits de retraite future.
La particularité d’une présence au Conseil de la Cavimac d’Administrateurs, « anciens ministres du culte ou anciens membres de collectivité religieuse », met d’emblée l’accent sur les conséquences de décisions impactant les retraites futures de tous les assurés de ce régime spécial. Des décisions prises à court terme peuvent devenir pénalisantes aussi bien pour les individus que pour les collectivités confrontées au vieillissement de leurs membres sans espoir de relève. Ces points de vue devraient pouvoir être entendus normalement au Conseil et plus encore dans les Commissions où un dialogue peut être facilité. L’Association pour une retraite convenable APRC est ouverte à toute personne ayant relevé ou relevant d’un statut cultuel. Son point d’ancrage et de réflexion est une pension « convenable » pour les droits acquis dans le cadre d’une telle appartenance cultuelle. Ce point de vue « original » et surtout spécifique fait partie d’une présence normale et apaisée au CA de la Cavimac.
JD
i Guide de l’Administrateur de Sécurité sociale, Docis, Paris 1997, p 123